Les liens entre organisation et projet de rupture
Les liens entre organisation et projet de rupture
Par Philippe Silberzahn – Le 10 mai 2017
Dans cette vidéo, nous allons voir quels sont les liens entre organisation et projet de rupture. Autrement dit, nous allons tenter d’analyser comment doivent être intégrés les projets innovants dans une entreprise. Mais aussi quel degré d’autonomie laisser à un projet de rupture.
Extrait de la vidéo de formation MOOC Innovation de Rupture
Sur la base du dilemme de l’innovateur et du conflit qui existe entre le modèle d’affaire de l’activité actuelle et celui du projet de rupture, nous avons vu qu’il était nécessaire d’isoler ce dernier dans une entité autonome, afin qu’il puisse créer son propre modèle et grandir sans être étouffé par le l’activité actuelle. Mais quel est le degré idéal d’autonomie du projet de rupture ?
Trouver le bon dosage
Lorsqu’il s’agit d’estimer le meilleur degré d’autonomie du projet de rupture, on peut avoir deux extrêmes : s’il n’y a aucune autonomie, et une intégration complète avec l’activité actuelle, c’est la mort assurée. Mais une autonomie totale, sous la forme par exemple d’une externalisation dans une filiale, présente aussi des inconvénients importants pour le projet, mais aussi pour l’entreprise.
L’inconvénient pour le projet est qu’en cas de complet détachement, il va lui être difficile de s’appuyer sur l’organisation actuelle. À l’extrême, le projet ne représentera plus qu’un investissement financier dans un projet externe qui se transformera vite en startup autonome. Rapidement les liens initiaux entre les individus se distendent et la startup se retrouve seule, et le fait de « faire partie d’une organisation » ne représente en fait plus d’avantage, elle est comme les autres startups.
L’inconvénient de l’éloignement complet pour l’entreprise est que du fait de cet éloignement, le projet ne servira pas à la rendre plus innovante. La distance empêchera les transferts de connaissance d’une entité à l’autre. Comme au final le projet se réduit à un simple investissement, la culture entrepreneuriale qui se développe dans le projet n’alimentera pas un changement de culture dans l’organisation d’origine.
Il faut donc bien réfléchir au véritable objectif de l’organisation en permettant le succès du projet de rupture par externalisation.
La séparation de l’entité comme objectif tactique et stratégique
Il peut y avoir un objectif tactique à séparer l’entité abritant l’innovation de rupture: lancer des innovations qui vont être financièrement rentables. Dans ce cas, l’entreprise est une sorte d’incubateur pour les idées générées à l’intérieur par ses employés.
Mais il peut y avoir également un objectif stratégique : faire en sorte que les projets de rupture qui émergent à l’intérieur de l’organisation non seulement réussissent à déboucher sur des produits et services tangibles, mais que ces projets servent à transformer l’organisation.
Or ces deux objectifs ne sont pas toujours compatibles car, rappelons-le, il y a nécessairement un conflit entre l’organisation et le projet de rupture, les intérêts ne sont pas toujours alignés, ni-même alignables. Par exemple, le projet de rupture doit-il utiliser le SI de l’organisation ? Oui, parce que cela permettrait à la direction informatique de développer une expertise en matière de technologie mobile, par exemple, et serait plus rationnel au niveau de l’organisation car cela diminuerait le coût du projet. Mais cela risque de ralentir le projet et donc de compromettre sa réussite.
Le plus souvent, les entreprises choisissent une voie moyenne. Par exemple, Renault a complètement séparé la conception et la fabrication de la Logan dans l’entité Dacia, mais a tout de même commercialisé les véhicules dans son réseau. Bouygues Télécom a isolé l’équipe de son offre low-cost B&You sur un plateau dédié, mais celle-ci s’est appuyée sur l’infrastructure existante. Ce qu’il faut c’est bien regarder les points de conflit et les trancher.
Ce qu’il faut retenir
En résumé, s’il est nécessaire que le projet de rupture dispose d’une forte autonomie, il est important de bien réfléchir aux liens qu’il doit avoir avec le reste de l’organisation et surtout, que la relation entre les deux soit gérée de manière active par quelqu’un ayant suffisamment d’autorité pour trancher les conflits qui seront fréquents. Cela ne peut se faire qu’au plus haut niveau, celui de la direction générale.
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